Il y a 70ans : La rafle duVeld’Hiv


De l’ antisémitisme d’exclusion .....

Dans son livre “France 1941" publié la même année, avec le sous titre “ La révolution nationale constructive: un bilan et un programme”, René Gillouin, l’un des idéologues de la Révolution nationale voulue par Pétain, faisait comme suit l’éloge de Vichy, ce régime qui allait construire “un Etat national, autoritaire, hiérarchique et social”, Etat qui bannirait en son sein ou dépouillerait de “ toute influence dirigeante, les individus et les groupes qui, pour des raisons de race ou de conviction, ne peuvent ou ne veulent souscrire au primat de la patrie française: étrangers, juifs, francs-maçons, communistes, inter- nationalistes de toute origine et de toute obédience ».


En effet, dès l'été de 1940, une politique d’exclusion avait été mise en oeuvre par Pétain, sans que l'occupant ait alors exercé une quelconque pression, politique bafouant toute la tradition républicaine, non seulement d'accueil et d'asile, mais encore d'assimilation, politique se rattachant toutefois clairement à l’idéologie xénophobe prônée par la droite extrême depuis la fin des années trente, droite extrême qui revendiquait, depuis la débâcle, l'élimination politique et sociale de ce qu’elle appelait “ l’anti-France”


Cette politique d’exclusion se constitua en un véritable “ antisémitisme d'État “, comme le décrit Jean-Pierre Azéma ( 1), à travers notamment les deux statuts des Juifs promulgués, le premier en octobre 1940, le second en juin 1941.


Recenser, ficher, exclure :


Le 27 septembre 1940, le Commandement militaire allemand publiait la première ordonnance qui enjoignait impérativement aux Juifs de la zone Nord (français ou étrangers) de se faire recenser avant le 20 octobre et faisant obligation aux commerçants juifs d'afficher sur leurs magasins une pancarte: “ Entreprise juive”.


Le recensement des personnes juives allait commencer tout d’abord à Paris. Dès les 2 et 3 octobre 1940, la préfecture de police de Paris communiquait , par voie de presse et d'affiches sur les murs que
La déclaration prescrite par ordonnance du chef de l'administration militaire en France concernant les Juifs sera reçue, à Paris et dans le département de la Seine, par les commissaires de police.Les ressortissants juifs devront, en conséquence, se présenter dans les commissariats des quartiers ou circonscriptions de leur domicile, munis de pièces d'identité. Afin d'éviter une trop longue attente, les intéressés sont invités à se rendre, selon la première lettre de leur nom, aux dates indiquées au tableau

ci-après ”.


Le recensement s'échelonnait du 3 au 19 octobre, avec établissement de fiches liées à un dossier numéroté par célibataire ou par famille, fiches de couleur orange et beige pour les juifs étrangers ( fiche individuelle ou familiale), bleue pour les juifs français, fiches alimentant quatre autres “ fichiers”: un fichier alphabétique, un fichier par nationalité, un fichier par domicile (rue et numéro), un fichier par profession.


Le fichier central dit “Tulard” du nom du fonctionnaire de la préfecture qui l’avait réalisé, permettait donc d'identifier chaque Juif, de procéder aux vérifications demandées par l'administration et les divers services de police, de sélectionner les Juifs par rues, nationalités, etc., d'examiner le cas des personnes arrêtées.


La très grande majorité (environ 90 %) des Juifs du département de la Seine se faisait recenser en octobre 1940.


1


Dès le 26 octobre 1940, le Préfet de police de Paris pouvait informer le chef de l'administration militaire allemande de la région de Paris, qu’avaient “ été inscrits 85 664 sujets français, 64 070 sujets étrangers, soit au total 149 734 Juifs »


Le premier statut des Juifs : Le 18 octobre 1940 le premier statut des Juifs était promulgué par le gouvernement de Vichy

 

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Loi sur les ressortissants étrangers de race juive
(Journal Officiel du 18 octobre 1940)

Nous, Maréchal de France, chef de l'État français, Le conseil des ministres entendu,


Décrétons :

Article 1er. Les ressortissants étrangers de race juive pourront, à dater de la promulgation de la présente loi, être internés dans des camps spéciaux par décision du préfet du département de leur-résidence.

Art. 2. Il est constitué auprès du ministre secrétaire d'État â l'intérieur une commission chargée de l'organisation et de l'administration de ces camps. ...

Art. 3. — Les ressortissants étrangers de race juive pourront en tout temps se voir assigner une résidence forcée par le préfet du département de leur résidence.

Art. 4. — Le présent décret sera publié au Journal officiel pour être observé comme loi de l'État.

Fait à Vichy, le 4 octobre 1940. PH.PÉTAIN


Introduisant la notion de race juive, alors même que l'ordonnance allemande du 27 septembre ne faisait référence qu'à la religion juive, ce premier statut excluait en outre les Juifs de France de tous les postes de la fonction publique, de la presse et du cinéma et prévoyait leur exclusion des professions libérales.


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Le fichier “ Tulard” allait servir de modèle pour l'établissement des fichiers des autres zones comme le conseillait Xavier Vallat, premier commissaire général aux questions juives, pour pouvoir établir un fichier national : « Il conviendrait que le fichier de province soit établi selon un modèle unique. On ne saurait mieux faire, à cet égard, que de s'en rapporter à celui qui a été adopté par la préfecture de la Seine ».

En effet, depuis le 4 octobre 1940, en zone Sud, les préfets avaient le droit d’ interner administrativement les juifs étrangers, sans que ces derniers pussent engager une procédure de recours : des dizaines de milliers d'hommes, de femmes et d'enfants juifs allaient être internés dans les camps de Gurs, Noé, Récébédou, Le Vernet, Rivesaltes, où les forces de police ou de gendarmerie de l'État français viendraient les chercher pour les transférer à Drancy, antichambre des camps de la mort.

En Zone nord, pour satisfaire aux exigences du commandement militaire allemand en France et en application de la loi du 4 octobre 1940,1e gouvernement de Vichy demanda aux préfets, le 28 avril 1941, de créer des camps d'internement pour les Juifs étrangers.

Les étrangers étaient, par définition, des exclus du système vichyssois. Il fallait les expulser, dès que les circonstances le permettraient, ou maintenir dans des camps de zone sud ceux que la III éme République finissante avait déjà internés: républicains espagnols, réfugiés allemands ou autrichiens.

Dans le Morbihan, le 5 février 1941
le Feldkommandant de Vannes ordonnait la fermeture des 2 magasins juifs du département et, par une note du 14 février, demandait au préfet d’établir un rapport précisant que ladite fermeture était effective en fournissant un état des « stocks de marchandises régulièrement inventoriés ».

Au mois de mars les allemands ordonnaient le recensement « des juifs et demi juifs » par contrôle hebdomadaire des étrangers, juifs et apatrides. Selon Roger Le Roux, la consultation des Archives départementales permettaient de constater qu'il y aurait eu une centaines de Juifs recensés dans le Morbihan.

Le deuxième statut des Juifs
:
Le deuxième statut des Juifs promulgué le 14 juin 1941 allait parachever l’arsenal répressif
antisémite de Vichy.

 

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Loi du 2 juin 1941 remplaçant la loi du 3 octobre 1940 portant statut des juifs
(Journal Officiel du 14 juin 1941)

 

Nous, Maréchal de France, chef de l'État français, Le conseil des ministres entendu,

Décrétons :

Article 1er
— Est regardé comme Juif

1Celui ou celle, appartenant ou non à une confession quelconque, qui est issu d'au moins trois grands-parents de race juive, ou de deux seulement si son conjoint est lui-même issu de deux grands-parents de race juive. Est regardé comme étant de race juive le grand-parent ayant appartenu â la religion juive ;

2Celui ou celle qui appartient à la religion juive, ou y appartenait le 25 juin 1940, et qui est issu de deux grands-parents de race juive. 1...1

Art. 2. L'accès et l'exercice des fonctions publiques et mandats énumérés ci-après sont interdits aux Juifs : [....]

Art. 9. — Sans préjudice du droit pour le préfet de prononcer l'internement dans un camp spécial, même si l'intéressé est Français, est puni :

1D'un emprisonnement de six mois 4 deux ans [...], tout juif qui s'est livré ou a tenté de se livrer à une activité qui lui est interdite par application des articles 4,5 et 6 de la présente loi:

2D'un emprisonnement de un an à cinq ans [...], tout juif qui se sera soustrait ou aura tenté de se soustraire aux interdictions édictées par la
présente loi, au moyen de déclarations mensongères ou de manoeuvres frauduleuses. ...

Fait à Vichy, le 2 juin 1941. PH. PÉTAIN


Ainsi donc des citoyens français, parce que nés de “race juive”, selon les termes utilisés dans le texte de cette loi, étaient exclus de toute fonction élective et interdits d'un grand nombre de pro-
fessions: ils ne pouvaient plus être ni fonction-naires, ni officiers, ni magistrats, ni exercer un métier touchant aux médias, ni même exercer une profession commerciale,industrielle, artisanale, ou libérale, toutes professions soumises à des quotas drastiques.

Quant aux entreprises « israélites » de zone sud, leurs biens étaient « aryanisés », et placés sous la tutelle d'admi- nistrateurs provisoires, aux termes de la loi du 22 juillet
1941.

 

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Pour la première fois depuis l'instauration de la République, au mépris du principe fondamental d'égalité, des Français devenaient, en raison de leur naissance, des citoyens à part, de deuxième ou troisième zone. Quant aux Juifs vivant en Algérie, avec l'abolition du décret Crémieux, ils perdaient du jour au lendemain leur citoyenneté.

Les dirigeants de Vichy prétendaient justifier cet antisémitisme d'État en affirmant que les Juifs 3 français, même s'ils se prétendaient « assimilés », demeuraient “des métèques, et, comme tels, socialement plus dangereux même que les Barbares, car, par nature, ces “ êtres fourbesétaient toujours prêts à comploter.

Ainsi donc étaient repris par les propagandistes de Vichy les thèmes classiques développés par l’extrême droite depuis la fin des années trente, ceux de la conspiration judéo-maçonnique et du péril judéo-bolchevik, et étaient désignés les boucs émissaires responsables de la guerre, dont il était répété qu'elle avait été déclenchée sous la pression d'un “ lobby juif”.

Si cet antisémitisme d'État ne visait pas directement l’élimination physique des juifs et des étrangers, il préparait, en tout cas, tous les services de l’ Etat français à collaborer à la mise en oeuvre de celle-ci par le système nazi.

A l’ antisémitisme d’extermination .....


La Conférence de WANNSEE
:

Le 20 janvier 1942, dans les bureaux d'Eichmann au 56/58 Grossen Wannsee Strasse à Berlin, débutait la conférence organisée par Reinhard Heydrich, conférence qui réunissait les hauts responsables de la chancellerie du Reich, des ministères des Affaires étrangères, de la Justice et de l'Intérieur, des services de police (Gestapo, SD et du RSHA) et des administrations nazies des Territoires occupés de l'Est.

A l'ordre du jour de cette conférence, la systématisation et planification de ce que l'Histoire va appeler la «solution finale».

Il convient toutefois de rappeler que des massacres de masse avaient déjà été organisés depuis septembre 1941, en Pologne, où des milliers de Juifs avaient été gazés dans des camions équipés de bouteilles de monoxyde de carbone, ou dans le camp de Chelmno, ouvert depuis décembre 1941 dans le Warthegau (Poznanie polonaise annexée).

Plus à l'Est, dans les régions soviétiques conquises par la Wehrmacht, les tueries contre les populations juives s’étaient systématisées depuis août 1941, faisant des dizaines de milliers de victimes comme lors du massacre des juifs de Kiev, fin septembre 1941 à Babi Yar.

Lors de cette conférence du 20 janvier 1942, Heydrich précisait que le Fürher avait autorisé l’évacuation des juifs d’Europe vers l’Est, et présentait un “document de travail” recensant par pays la population juive d'Europe, estimée à 11 millions de personnes (dont 165. 000 pour la zone occupée de France et 700. 000 pour la zone sud et les colonies).

Heydrich ajoutait que les actions d’évacuation des Juifs vers l’Est étaient à considérer uniquement comme des solutions transitoires qui [permettraient] d'acquérir des expériences pratiques qui seraient très précieuses pour la solution finale à venir de la question juive”.

Selon Heydrich, les juifs évacués vers l’Est seraient astreints à des travaux forcés qui réduiraient naturellement leurs effectifs”. Quant aux éléments les plus forts de la race, le noyau de sa renaissance”, ils devraient être traités en conséquence”.

La déportation vers le camp d'Auschwitz-Birkenau résulta d'une série décisions prises au sommet de l'État nazi.

Il s’agissait non seulement d’ exercer des représailles contre les supposés responsables des 4
attentatsvisant des soldats allemands, mais aussi de mener une guerre d'anéantissement contre le
judéo-bolchevisme ”, et de procéder à l'extermination systématique des Juifs d'Europe.

L'organisation de la déportation des Juifs de France relevait par ailleurs de plus en plus de l'autorité directe de Helmut Knochen, chef de la Sipo-SD en France.

À la fin du printemps 1942, la Sipo-SD prit le contrôle des opérations répressives en zone occupée . Le 1er juin 1942, Karl Oberg fut officiellement installé en qualité de chef supérieur de la SS et de la Police en France, ce qui confirmait la décision d'Himmler d'accélérer le processus d'extermination des juifs dans toute l'Europe.

Le SS Oberg, représentant direct d’Himmler en France, allait supplanter le commandement militaire allemand dans la politique répressive, concernant tant les Juifs que les résistants.

Du 23 mars au 28 juin 1942, 5 convois partirent des camps de Compiègne, Drancy, Pithiviers et Beaune-la-Rolande emportant au total 5. 149 Juifs français et étrangers vers le camp d'Auschwitz.

Le premier convoi parti de Compiègne le 23 mars 1942, était composé, pour moitié de détenus de Drancy , des Juifs étrangers arrêtés à Paris dans la rafle du 20 août 1941, et pour moitié de détenus de Compiègne, en grande partie des Juifs français arrêtés à leur domicile à Paris le 12 décembre 1941, et des Juifs étrangers envoyés de Drancy à Compiègne pendant l'hiver 1941-1942.

C'est avec le troisième convoi, du 22 juin, que, pour la première fois, des femmes furent déportées.
En revanche, entre le 7 juillet et le 11 novembre 1942, 38 convois partirent de France emportant à chaque fois environ 1.000 personnes juives vers Auschwitz.

La collaboration française dans la déportation des Juifs :

Au cours des mois de juin et juillet 1942 des pourparlers eurent lieu entre Karl Oberg, Commandant-chef des SS en France, et René Bousquet, secrétaire général à la police de Vichy depuis avril 1942. Ils aboutirent aux accords de collaboration entre les administrations et polices françaises et allemandes en vue de futures rafles et déportations, notamment, dès juillet 1942, dans la région parisienne.

Plus précisément, Pierre Laval, Président du Conseil, depuis avril 1942, venu à Paris le 27 juin 1942, acceptait d'exécuter les exigences allemandes et de mettre la police française à la disposition de la Gestapo pour exécuter le programme allemand de déportation.

Bien qu’il refusât de livrer les juifs de nationalité française, Pierre Laval accepta d'associer l’ Etat français au projet global antijuif des nazis. Non seulement ce projet s'inscrivait dans les conceptions antisémites de Vichy, mais encore conforté par les récents succès de la Wehrmacht en Afrique et en URSS, Pierre Laval restait convaincu que l’Allemagne hitlérienne gagnerait la guerre,

Au conseil des ministres le 10 juillet 1942, présidé par Philippe Pétain, Pierre Laval, après avoir rendu compte de son entrevue avec Karl Oberg osait exposer que "dans une intention d'humanité,[ il avait ] obtenu – contrairement aux premières propositions allemandes – que les enfants, y compris ceux de16ans,[fussent] autorisés à accompagner leurs parents".

Or, les Allemands n'avaient pas prévu de déporter les enfants.

Pris au dépourvu par la demande française, le chef de la Gestapo de Paris adressait un télégramme le 6 juillet 1942 à Eichmann ainsi libellé : "... Le président Laval a proposé lors de la 5 déportation des familles juives de la zone non occupée d'y comprendre également les enfants âgés de moins de seize ans...Je vous demande de prendre une décision urgente, par télégramme afin de savoir si, à partir du 15e convoi de Juifs, les enfants au-dessous de seize ans pourraient également être déportés..."

Berlin ne prenait de décision à ce sujet qu'après de nombreux appels de la Gestapo de Paris.
Laval savait-il ou pas, en juin 1942, que "la déportation vers l'Est" des enfants juifs signifiait leur condamnation à mort? A ce jour, la question n’aurait toujours pas reçu de réponse certaine de la part des historiens.

L’organisation de la rafle du Vel d’ Hiv :

Après plusieurs réunions entre autorités allemandes et françaises, la police française, sous le contrôle du Sipo-SD, opérait les 16 et 17 juillet 1942 la vaste rafle de Paris et de sa banlieue, dite rafle du Vel d'Hiv

Comme le montrent les recherches effectuées par Serge Klarsfeld et Annette Kahn, les diverses circulaires établies par la préfecture de Paris entre le 4 et le 13 juillet 1942, révèlent à suffire comment le fichage de la population juive avait permis un quadrillage méthodique des divers arrondissements de Paris et combien active allait être la collaboration des services de police pour parvenir à arrêter dans un premier temps 22.000 juifs , représentant le 1/5 des Juifs devant être pris en considération à Paris, comme pour identifier, non seulement ceux qui étaient arrêtés, mais aussi ceux qui avaient échappé à l’interpellation.

La circulaire en date du 13 juillet 1942 précisait que les équipes d’arrestation devaient être composées d'un gardien en tenue et d'un gardien en civil ou d'un inspecteur des Renseignements Généraux ou de la Police Judiciaire. Des listes étaient établies par arrondissement et pour la première fois, ces listes comprenaient des noms de femmes et d'enfants.

Un ordre nouveau avait également été donné à la police française: il ne fallait pas prendre en considération l'état de santé des personnes inscrites sur les listes. Tout Juif à arrêter devait être conduit au Centre de rétention quelque fût son état de santé.

Le 16 et le 17 juillet 1942, environ 13 000 Juifs étaient arrêtés qui se répartissaient comme suit : au moins 3 031 hommes, 5 052 femmes et 4 051 enfants

Pour expliquer la différence entre le nombre élevé de femmes par rapport à celui des hommes, l’hypothèse suivante est avancée : jusqu'au 16 juillet 1942, les rafles ne visaient que les hommes ; aussi, certains hommes auraient-ils pu être prévenus, la veille, par des policiers français résistants, de l'imminence d'une rafle, ils se seraient cachés, seuls, leurs femmes et leurs enfants ne devant pas être concernés par cette rafle.

Les familles avec enfants, soit 8 160 personnes, furent conduites dans l'enceinte du Vélo drome d'Hiver de Paris, les autres personnes arrêtées, au camp de Drancy. Elles furent envoyées dans les jours suivants vers des camps ouverts dans le Loiret, à Pithiviers et Beaune-la-Rolande, puis déportées vers Auschwitz.

Alors que cette opération était ordonnée depuis près d'un mois, ni nourriture, ni eau, ni sanitaires n’étaient prévus au Vel d’Hiv. Pendant plusieurs jours, 8 000 personnes furent parquées, affamées, assoiffées, en plein Paris, sous la surveillance de la gendarmerie et de la police françaises.

Röthke, membre de la Gestapo de Paris, aurait ce commentaire cynique sur le vélodrome : 6
"C'est comme une volière ,... les Juifs [ semblaient] des oiseaux privés de liberté, affolés, se heurtant aux parois de leur cage bien gardée" (Claude Lévy, Paul Tullard, La grande rafle du Vel' d'Hiv').

En août 1942, appliquant les accords conclus avec les nazis, le secrétaire général à la Police fit procéder à des arrestations et rafles dans toute la Zone sud concernant tous les Juifs étrangers entrés en France après le 1er janvier 1936.

Du 6 août à la fin du mois d'octobre 1942, 1e gouvernement de Vichy livrait 11. 009 Juifs de la Zone sud aux autorités allemandes.

Au cours de l'année 1942, suite aux directives issues de la Conférence de Wannsee, par 43 convois s’échelonnant du 23 mars au 11 novembre (2 ), les responsables de la Sipo-SD, avec la complicité des services de l’Etat français, déportèrent 41.951 Juifs, hommes, femmes et enfants, vers le camp d'Auschwitz où la majorité d'entre eux furent mis à mort dans les chambres à gaz à leur arrivée. Seuls 784 hommes et 21 femmes, déportés cette année là, survivaient en 1945.

Alors qu’ils s’étaient réfugiés dans le Morbihan périrent ainsi dans les camps nazis, les personnes suivantes dont nous rappelons le nom, par ordre alphabétique, en ultime hommage à ces victimes qui n’ont plus pour tombe que leur nom :

Héléna Czyzewski, née en juin 1903 en Pologne, Szlama Czyzewski, né le 29 septembre 1909 en Pologne, convoi parti d’ Angers le 20 juillet 1942

Cyla Ehrenreich, née le 21 mars 1923 en Pologne, convoi parti d’ Angers le 20 juillet 1942

Salomon Eilstein, né le 16 février 1901 en Pologne,convoi parti de Beaume le 28 juin 1942, Chaja Eilstein, née le 20 août 1891 en Pologne,Théodore Eilstein, né le 22 septembre 1926 en Pologne,convoi parti d’ Angers le 20 juillet 1942, Israël Giske , né le 18 novembre 1890, en Pologne, convoi parti d’ Angers le 20 juillet 1942 Jenny Grinspan, née Kern, le 8 juin 1907, convoi parti de Drancy le 16 septembre 1942 Pinkus Grinspan, né le 15 juillet 1893 en Pologne, convoi parti d’ Angers le 20 juillet 1942

Esther Hanen, née Cohen le 15 septembre 1898 à Salonique en Grèce, Frida Hanen née le 6 février 1925 à Salonique, Laura Hanen née le 7 février 1922 à Salonique convoi parti d’ Angers le 20 juillet 1942, Jacob Hanen, né le 16 octobre 1894 à Salonique, convoi parti de DRANCY en novembre 1942

Klara Korn, épouse Selig, née le 27 juin 1913 en Pologne, convoi parti d’ Angers le 20 juillet 1942

Salomon Rotsculd, né le 4 août 1893 en Pologne, convoi parti de Drancy le 6 novembre 1942

Nicolas Rosenczveig, né le 27 janvier 1910 à Statu Mare en Roumanie, convoi parti de Drancy le 4 novembre 1942

Elias Swiatly, né le 13 septembre 1896 en Pologne, convoi parti d’ Angers le 20 juillet 1942

Naftula Wajl, né le 25 janvier 1898 en Pologne,convoi parti de Beaume le 28 juin 1942, Hélène Wajl, née le 14 décembre 1922 en Pologne, convoi parti de Drancy le 6 novembre 1942

Sarah Weintraub, née le 26 avril 1903 en Pologne, Pologne, convoi parti de Drancy le 27 juillet 1942

Salyou GabyWechsler, née le1er juillet 1906 en Roumanie, convoi parti de Drancy le 4novembre 1942

Auguste Zalewski, né le 29.06.1921 à Quiberon, convoi parti de Saint Lô le 28 avril 1941

Wolff Zelikovitz, réfugié, né le 20 mai 1868 à Paltava en Roumanie, convoi parti de Drancy le 4 novembre 1942

7

Max Zwejschkenbaum, né le 28 janvier 1895 en Pologne, Nathan Zwejschkenbaum, né le 9 juillet 1920 en Pologne, convoi parti de Pithiviers le 17 juillet 1942

Erna Zwetschkenbaum, née le 17 avril 1923 en Pologne,Maria Zwetschkenbaum née le 28 mars 1895 en Pologne, Naschum Zwetschkenbaum, né le 5 septembre 1925 en Pologne, Régine Zwetschkenbaum née le 16 mai 1929 en Pologne, convoi parti d’ Angers le 20 juillet 1942 ( 3)

La rédaction

( 1) Jean-Pierre Azéma, le Régime de Vichy ( pages 163 à 170) dans La France des Années Noires (2 ) Serge Klarsfeld, dans Mémorial de la déportation des Juifs de France ( 1978)
( 3) voir aussi, sur le site de l’ ANACR 56, lesamisdelaresistancedumorbihan, le récapitulatif des convois de déportés du Morbihan pour les années 1941 et 1942.