Raymond  Tréguier

Mon père Raymond Tréguier, né le 24 mai 1927 à Bannalec, est l'un d'eux. Habitant Quéven en 1943, Il a pris le Maquis avec son Mauser qu'il avait seul à 16 ans, été récupérer dans un talus à l'intérieur du périmètre de la base de Kerlin-Bastard, (actuel Lann-Bihoué). Deux fusils de guerre y avaient été caché vraisemblablement à la suite du combat pour l'honneur mené par les fusiliers marins en juin 1940 aux cinq chemins de Guidel: Un lebel de cavalerie et un Mauser, avec les lots de cartouches correspondantes (environ 400 cartouches)). Il les sortit à la barbe des sentinelles allemandes par la voie ferrée qui liait alors la base aérienne au réseau ferré.
 Il avait voulu s'engager dans la résistance à l'été 1943 et s'était vu répondre: Ce qu'il nous faut, ce n’est pas des bonhommes, les bonhommes, on en a, ce qui nous manque, c'est de l'armement! On sait où il y en a... Il y en a caché dans un talus sur la base aérienne...
 Mon père ainsi refoulé sans doute à cause de son jeune âge, avait vaillamment relevé le défi. Il a gardé pour lui le Mauser ainsi que ses cartouches et a livré dans les cuisines du restaurant BEVAN de Plouay le Mousqueton LEBEL de cavalerie et ses cartouches. En remerciement, il eut un bon repas directement dans la cuisine.
 Plus tard il fit une bêtise adolescente qui faillit bien lui coûter la vie: Dans le jardin de la maison familiale, à l'insu de tous, il manipulait son MAUSER quand un coup partit!
 Aussitôt, les allemands cernèrent le quartier et entreprirent la fouille systématique des maisons...
 Mon père cachait son fusil et ses munitions dans le tronc creux d'un vieux pommier du jardin! Les allemands fouillèrent la maison. Mon grand-père  avait fait toute la guerre de 14. Il était gravement handicapé à cause d'un accident de char-à-banc. Lorsque le lieutenant allemand se baissa pour inspecter le conduit de cheminée de la maison, mon grand-père l'y poussa!
Mon grand-père, mon père et ses trois frères et sœur furent alignés contre le mur, le temps de la fouille...
Plus tard, mon grand-père sermonna mon père. Il lui dit en définitive:
Tu as vu où ça mène tes conneries! Que veux-tu faire?
Prendre le Maquis!
Et bien fous le camp le plus rapidement possible et ne reviens pas!
 
Son premier groupe de résistants avait sept membres. L'un était blessé d'une balle dans la cuisse... Ils étaient cachés aux environs de Plouay. Et cinq d'entre eux voulurent aller au bal! Mon père préféra rester avec le blessé... En pleine nuit, ils furent prévenus par un vieillard que les allemands fouillaient toutes les maisons des environs. Mon père porta le blessé sur son dos, l'emmena jusqu'à un talus éloigné. Puis lui demanda de s'éloigner par ses propres moyens pendant qu'il retournait chercher les armes. Au sortir du grenier, un allemand montait déjà la garde au pied de l'échelle. C'était la seule sortie. Mon père armé de son Mauser sauta à terre, essuya un coup de feu, répliqua et réussit à s'enfuir!
Ses cinq copains finirent fusillés dans la citadelle de Port-Louis... Quant au blessé, il ne sait pas ce qu'il est devenu.

Il combattit sur la poche de Lorient jusqu'au 10 mai 1945. Il fut blessé deux fois lors de ces combats.
Il participa au combat de SAINT-NUDEC près d'Hennebont. Armé d'une MG42, une bande de cartouches engagée, il courrait à la rescousse des quatre gars d'une patrouille française prise à partie dans le NO MAN'S LAND par les allemands, à 2 kilomètres devant les lignes. La file des quinze français s'étirait un peu. Mon père était le quatrième. Les trois premiers traversaient un champ. Le premier, le sergent RUFFAU escaladait un talus et déclencha le tir des allemands qui étaient cachés derrière. Mon père eut juste le temps de plonger à terre en position de tir. Pendant ce temps ses trois prédécesseurs étaient tués. Mon père, très bon tireur, fit mouche à plusieurs reprises en utilisant son arme par courtes rafales. Bientôt rejoint par son pourvoyeur, Monsieur Jean le BOUEDEC de Lanester, et par le reste de ses camarades qui notamment réussirent à prendre à revers certains de leurs adversaires, ils dégagèrent la patrouille. Ils firent parait-il 18 morts du côté allemand. Eurent 4 morts et quelques blessés, dont le pourvoyeur de mon père qui fut blessé d'une balle en pleine tête. Les français se replièrent et mon père ramena son copain sur son dos tout en tiraillant debout à la MG42. Il sauva ainsi son camarade d'une mort certaine... les allemands n'étaient pas très magnanimes... à cette époque.

 
Il participa à l'attaque du poste du allemand de la ferme du Stérile en traversant la Vilaine avec cinq camarades de la première compagnie (corps franc) du 4ème RANGERS... Ils ramenèrent six prisonniers allemands après deux traversées de la Vilaine. Première croix de guerre!
Il est titulaire de cinq croix de guerre. deux comptant pour 39-45 et trois pour l'Indochine où il fut blessé trois fois: Une balle dans le dos en 1947, une balle dans le bras en janvier 1954 puis la dernière au genou gauche, qui mit fin à sa carrière militaire de onze années de guerre.